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Image de Kimberly Farmer

COLLÈGE : LA CARTE SCOLAIRE ENTRETIENT L’ISOLEMENT SOCIAL

Fantine Dantzer et Alizée Calvo

Dans la Métropole de Lyon, la mixité sociale dans les établissements laisse à désirer. Les parents d’élèves alertent : les élèves aisés et défavorisés ne se croisent pas. La faute à un découpage scolaire qui accentue
la « ghettoïsation ». Cartes et infographies à l’appui. 

Mention bien pour le collège Théodore Monod et ses 554 élèves. Avec 95,5% de réussite au brevet en 2021, le collège se place en tête parmi les écoles de l’académie de Lyon. Par contre, côté mixité sociale, l'établissement, situé à Bron dans la banlieue Lyonnaise, a quelques lacunes. Il ne brille pas dans le dernier recensement des indices de position sociale (IPS) des collèges, publié par le ministère de l’Éducation mi-octobre. 


Le score IPS le plus élevé auquel un établissement peut prétendre est fixé à 160 points. Les plus faibles valeurs correspondent aux établissements accueillant les élèves les plus défavorisés, et les plus fortes reflètent celles où sont scolarisés les élèves les plus aisés. Théodore Monod obtient  la note de 86,5 points. 


Après la publication des IPS, pour beaucoup le constat est simple : l'école est devenue un système à deux vitesses, des établissements réservés aux enfants privilégiés, et des écoles qui accueillent tous les autres.

DES FRONTIÈRES SCOLAIRES QUI RENFORCENT L’ENTRE SOI
Premier coupable selon les parents : le découpage de la carte scolaire. Ce tracé géographique désigne l’affectation des élèves dans un collèges, lycée, en fonction de leur domicile. Mais contrairement aux recommandations légales, cette carte ne parvient que très rarement à assurer la mixité sociale. En 2018 Insee avait déjà pointé du doigt la forte hétérogénéité sociale des élèves dans les collèges et lycée. Les pauvres et les riches ne se mélangent pas. 


Cette ségrégation devient visible lorsqu’on superpose la carte du découpage scolaire avec certaines données socio-économiques. Une « ghettoïsation » particulièrement perceptible lorsqu’on étudie la répartition des revenus au sein d’un même secteur scolaire. Exemple avec la Métropole de Lyon. 

 


 

*Les lignes noires représentent le tracé de la carte scolaire.

L’association lyonnaise No ghetto!, basée à Vénissieux, promeut une plus grande mixité à l’école et demande une refonte totale de la carte scolaire.« Le problème c’est finalement que les quartiers sont déjà ghettoïsés, alors ça se répercute dans les écoles, se désole la vice-présidente de l’association, Khadi, Les élèves aisés de l’ouest lyonnais et les pauvres de la banlieue ne se croisent même pas à l’école. » 


Permettre à ces élèves de se croiser demeure complexe. En suivant les logiques de capacité d'accueil et l’accessibilité en transport des établissements, la carte scolaire regroupe toujours des élèves habitants à proximité de leur collège d’affectation. Pourtant lorsque certains quartiers présentent une forte homogénéité socio-économique, les frontières scolaires ne font que renforcer l’entre soi.

 

 

Les quartiers les plus défavorisés -à gauche- sont rattachés au collège Mermoz, ceux plus favorisés -à droite- au collège Théodore Monod. Entre les deux, un kilomètre de distance mais 38,9 points de différence dans le taux de réussite au brevet en 2021.

MIXITÉ SOCIALE ET RÉUSSITE SCOLAIRE

Favoriser la réussite scolaire des élèves était pourtant l’objectif du plan pour la mixité sociale lancé en 2016 par la ministre de l’époque, Najat Vallaud-Belkacem. Car oui, nombreux sont les exemples qui illustrent la corrélation entre le milieu social des élèves et leur réussite scolaire. C’est notamment le cas dans la Métropole de Lyon. 
 

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C’est le cas notamment pour les quartiers voisins de Rockefeller la Buire,  Bataille et Ganton moins favorisés et ceux de Essarts Nord, Essarts Sud et Bron Sud plus favorisés. Là, le découpage de la carte scolaire semble coller à des périmètres où la population semble très homogène.

Prenons l’exemple de trois collèges : Jules Michelet à St-Ouen, Jean-Philippe Rameau à Champagne-au-Mont-d’Or et Théodore Monod à Bron.

On constate que l’écart qui sépare le revenu médian minimum et le maximum est petit pour les deux collèges. Jules Michelet accueille des enfants dont les parents ont un revenu médian maximum de 15 216€ par an. À Théodore Monod, il est presque deux fois plus élevé (24 369€ par an). Une différence qui semble se répercuter sur les résultats au brevet des élèves : 66,30% dans le premier, 95,80% dans le second. 

Quel bilan tirer ? Les élèves qui n’ont pas la chance de grandir dans un milieu social privilégié sont défavorisés face à des examens comme le brevet. Mais bonne nouvelle, la mixité sociale semble la solution pour remédier à ce problème. Le collège Jean-Philippe Rameau fait figure de bon élève. 

Comme visible sur le graphique, l’écart entre le revenu médian minimum et maximum est important, et sur la carte on voit que le taux de réussite au brevet est de 97%. Ceci déconstruit l’idée que la mixité sociale serait un frein à la réussite scolaire.
 

Cependant le chemin semble encore long avant de convaincre tous les parents de la réussite de la mixité sociale. Dans la métropole de Lyon, l'évitement scolaire reste important. Nombreux sont ceux qui tentent d’éviter le collège de secteur en changeant d’adresse, en demandant des options voire en inscrivant leur enfant dans un établissement privé qui ne dépend pas de la carte scolaire. En 2021, selon l'académie de Lyon, 30% des collégiens étudiaient dans le privé.

MÉTHODOLOGIE

Différentes données ont été mobilisées dans cet article.

  • Découpage scolaire de la Métropole de Lyon : ici 

  • Découpage Iris de la Métropole de Lyon : ici 

  • Indice de positionnement social des collèges de France : ici 

  • Résultats au brevet par établissements français en 2021 : ici 

  • Revenu médian par Iris en 2018: ici

 
Pour la réalisation des cartes, il a été question de superposer la carte des secteurs scolaires de la Métropole de Lyon avec la carte des IRIS
Les IRIS correspondent à des zones d’études statistiques de l’INSEE (elles permettent d’avoir des informations sur les revenus, le taux de chômage etc. à petite échelle).
Le choix a été fait de regarder le revenu médian car il s’agit de l'indicateur qui nous donnait le plus d’informations sur les IRIS. 

Pour le graphique par secteur scolaire, il a été question de trouver quels IRIS étaient compris dans chaque secteur. Le but était de dégager le revenu médian minimum, moyen et maximum par secteur afin de visibiliser par des segments la mixité sociale (plus le segment est grand, plus la mixité l’est). 
 

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